En ce temps-là, la famine sévissait partout en Basse-Bretagne.
Partout, sauf... à Pluguffan.
Il y avait en effet un chat qui, installé sur le porche granitique à l'entrée du cimetière, avait une vue sur toute la commune, et rien n'échappait à ses griffes, pas le moindre mulot se faufilant dans les champs. Car il s'agissait bien de ces rongeurs, pullulant, dévastant les cultures telles les sauterelles en Australie, qui causaient la famine. Mais à Pluguffan le matou veillait, et tandis que les campagnes alentour subissaient la famine, les Pluguffanais survivaient.
La rumeur du félin redoutable prédateur atteignit la commune voisine bigoudène de Pouldreuzic, mais leurs habitants, bien que souffrant terriblement d'inanition, pour une question de fierté ne souhaitèrent pas s'abaisser à quémander une aide extérieure, encore moins originaire d'un territoire glazik. Cependant, un groupe de jeunes, l'estomac grondant, ravalant leur fierté, se mirent en route afin de ramener en prêt le chat fantastique.
Ils butèrent face au refus unanime des Pluguffanais qui ne voulaient pas le retour de la vermine sitôt le chat parti. En plus de la rivalité glazico-bigoudène ancestrale, les Pluguffanais se rappelaient les charrettes de Pouldreuzic remplies de carottes, alors que cette culture n'avait pas du tout cours à Pluguffan, les Bigoudens traversant la bourgade d'un air narquois.
Rentrant bredouille, la troupe informa du refus du prêt du chat au reste de la population de Pouldreuzic. Dans un premier temps, les jeunes hommes échafaudèrent la capture du félin, mais anticipant des griffures terribles promises lors de l'enlèvement, en occultant la difficulté de se saisir de l'animal, en hauteur sur le porche, ils abandonnèrent cette idée. Puis le plus malin d'entre eux eut à l'esprit une idée plus mesquine, qu'il partagea avec ses acolytes.
Ils attendirent une nuit noire, de nouvelle lune, pour se faufiler dans Pluguffan. Le chat, du haut de son perchoir, n'eut aucun mal à les repérer, riant sous cape, les yeux plissés, de la tentative d'approche qui s'annonçait calamiteuse. Ce qu'il ne vit pas, derrière lui, c'est le jeune malin, perché sur les épaules d'un deuxième homme, qui, ciseaux en main, lui coupa soudain la queue !
Car il est connu qu'un chat déduit de sa queue n'est plus que l'ombre du chasseur qu'il fût.
Aujourd'hui encore, à Pouldreuzic, on dit d'un gars débrouillard qu'il est « capable de couper la queue du chat de Pluguffan ».
lundi 19 janvier 2009
Oui, ce journal électronique recèle de textes qui sont malgré tout ma propriété. Si vous souhaitez en utiliser un, contactez-moi grâce à l'adresse suivante : sacred.fire.blogspot@gmail.com
Merci !
Yohann ©®™☺☼♥♫≈(2003-2009)
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4 commentaires:
on va baisser d'un ton sur les Bigoudens, Môssieu ,-)
Les Bigoudens sont apparentés aux Écossais ! Arf arf !
Bonjour, je suis venue un peu par hasard sur votre blog, mais y reviendrai volontiers car j'ai pris beaucoup de plaisir à sa lecture. Je ne suis pas bretonne, mais aime beaucoup cette région que je visite régulièrement. Les légendes bretonnes sont particulièrement interressantes et instructives. Merci et à bientôt
Castor
Bienvenue chez moi, Castor !
J'irai bien évidemment faire un tour sur vos blogs. En ce qui concerne les légendes bretonnes, les deux premiers textes sont inventés, le troisième cependant m'a été raconté le week-end dernier par quelqu'un qui s'y connaît en histoires locales, et un jour j'avais entendu le début, mais pas la fin... L'occasion s'est présentée !
Ce pseudo de castor, c'est en reconnaissance du Père Castor ? Ou bien vous avez rencontré votre Jean-Paul Sartre ? :o)
Bonne lecture, et merci !
Yo
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