Chaque pas crée une explosion moelleuse mélangeant eau et sable.
La température de la mer est nettement plus agréable que celle de la rivière.
L'eau lui chatouille l'arrière des genoux. Gaya s'arrête et, jetant un coup d'œil à ses pieds, remarque quelque chose qui s'interpose entre elle et le fond sableux. Cette chose bouge, indépendamment de l'onde.
Gaya s'approche en se penchant mais, stupeur ! la chose fait de même ! L'enfant a un mouvement de recul. Contrariée, intriguée aussi, Gaya fait quelques pas plus loin. L'eau opère une croissante résistance à son avancée.
La marche dans la mer est plaisante, les courants tièdes s'enroulant autour de ses membres lui donnent la sensation d'être enveloppée dans un coussin d'air chaud, cependant la présence de la chose tend à gâcher cela. D'un mouvement vif, elle jette une jambe tendue en-dehors de l'eau, soulevant d'innombrables gouttelettes éclatantes et accessoirement la chose des profondeurs – du moins elle le croit.
Elle replonge sa jambe dans les tourments aquatiques ainsi engendrés. Attend que ça se clame. Lève les yeux au ciel, qui ne comprend que de petits nuages dociles, aucun volatile.
Entre les bulles qui s'éloignent, la chose n'a pas disparu. Interloquée, l'enfant tend un bras ; la chose effectue aussi un geste. Véritablement agacée, Gaya relève brusquement la tête et va plus avant.
Avec l'eau à hauteur de taille, se mouvoir demande davantage d'efforts. Les pointes de ses cheveux s'étalent sous la surface tels des rayons dorés. Le fond de la mer n'est pas uniforme ; le flot du sable est intimement dépendant aux vents caressant les eaux.
Tout à coup, Gaya plonge. L'intention était de surprendre la chose, mais c'est l'enfant qui sera plus grandement surprise. Ressortant tout aussi soudainement de l'eau, elle crache, elle tousse, elle suffoque ; elle a bu la tasse.
Une douleur diffuse lui prend les narines quelques instants, Gaya respire goulûment par la bouche. Une cascade de cheveux dégoulinant lui barre la vue tandis que le goût salé de la mer lui agite la langue. Elle pose une main sur son thorax alors que la douleur s'y déplace. Indifférente aux mouvements des vagues l'enfant s'apaise. Respirer sous l'eau était une erreur qu'elle ne rééditera pas ; elle n'est pas apte à le faire, donc à y vivre.
Gaya écarte ses cheveux et à travers la surface troublée aperçoit la chose. Ne ressentant plus aucune répulsion ou animosité à son égard, l'enfant prend une expression pensive. Puis elle fléchit des genoux et doucement, lentement, rapproche ses mains de ce qui semble être une figure ; la chose procède de la même manière, mais Gaya n'est plus aussi étonnée qu'auparavant. Les rides aquatiques froissent un instant l'image ainsi que deux gouttes dégringolant de son nez ; redevenue assez nette, Gaya l'examine attentivement.
Une première idée lui traverse l'esprit, sans pouvoir s'amarrer.
« Non. »
A rester fixer ce visage, Gaya s'enfonce dans une étrange torpeur. Une de ses mains caresse délicatement une joue ; en face aussi, en même temps.
« Peut-être... »
Une mèche s'échappe et lui passe devant les yeux ; de l'autre main elle la rejette en arrière : là aussi, il en fut de même.
Cela en réalité achève de la convaincre. C'est son reflet, c'est elle-même, Gaya.
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